D’odieuses images circulent sur un effroyable massacre de civils aux armes chimiques et le monde entier s’insurge naturellement contre la barbarie.L'horreur suscite dégoût et révolte. Doit elle pour autant générer des réactions qui feraient courir au monde d'autres dangers?
Car les va- t-en guerre occidentaux , ne pouvant obtenir le soutien des Russes et des Chinois, échafaudent déjà des représailles militaires en dehors du cadre de l’Onu, et le monde retient son souffle.
Où va t-on ?
L’Amérique, dont tout dépend en vérité,qui voudrait être assurée que l’arme chimique a bien été employée par le régime de Damas et non par un groupe d’opposants, temporise avant de s’orienter , à reculons, vers une intervention limitée dont l’objectif est de punir et, plus encore, de ne point perdre la face.
Les contrôleurs de l’Onu tentent de vérifier dans des conditions précaires la réalité et surtout d’identifier les auteurs du massacre car le crime pourrait profiter à l’un comme à l’autre camp. Gageons qu’ils ne pourront conclure avec certitude.
En Europe les Anglais sont comme de coutume aux côtés de l’Oncle Sam dès qu’il fait mine de dégainer fut ce sans cause réelle comme hier en Irak, l’Allemagne reste prudente comme l’y poussent ses intérêts laissant au coq gaulois de bomber le torse lui qui n’ a plus guère d’ergots tant il a choisi les profs et les fonctionnaires aux dépends de ses soldats.
La Russie de son côté gronde, soucieuse de préserver à tout prix son dernier allié et ses dernières facilités militaires au Moyen Orient.
Les monarchies du Golfe se taisent craignant un embrasement régional , tandis que la Turquie, membre ambigu de l’Otan, se dit prête à soutenir une intervention qui pourrait aider, en réalité, le courant islamiste sunnite opposant d’Assad.
Le vrai danger vient pourtant d’ailleurs, et plonge ses racines dans le conflit israélo musulman comme toujours depuis 1948 .
Il provient d'un côté d’Israël dont les faucons au pouvoir espèrent qu’une frappe pourrait entrainer l’Occident dans une guerre préventive contre l’Iran leur cible ultime. Il surgit de l'autre des mollahs iraniens, qui, alliés de l’alaouite Assad via le Hezbollah chiite pour battre islamistes sunnites et laïcs, espèrent détourner la révolte des Iraniens contre leur régime aux abois en réalisant l’union nationale dans un nouveau djihad.
Qui ne voit que cette situation complexe où s’imbriquent une guerre civile et des intérêts de puissances est extrêmement dangereuse et que tous les éléments d’un engrenage que nul ne maitrise sont réunis ?
D’un côté, nul n 'est assuré à cet instant que le régime d’Assad est le responsable du recours aux armes chimiques, même s’il y a des présomptions fortes.
De l’autre, l’environnement géopolitique local est marqué par la présence de deux états belliqueux ( Israël et l’Iran) bien plus concernés par leur rivalité locale que par le sort des populations civiles syriennes.
Enfin , les principales puissances mondiales , USA et Russie, sont engagées ici dans un bras de fer où la perte de face et de prestige de l’un ou l’autre de leurs dirigeants serait intolérable. La Russie ne pourra éternellement accepter d’être humiliée par un Occident triomphant depuis l’effondrement de l’Urss.
Qui ne se souvient parmi nos politiques, en Europe particulièrement, que les conflits sont à trois reprises depuis 1870 nés de l’irrationnel, d’analyses erronées, et d’engrenages non maitrisés ?
Le casus belli apparent aujourd’hui provient certes de ce qu’il y a eu attaque chimique et que l’Occident ne peut rester les bras croisés sans réagir , parce que le droit international l’y pousse et parce qu’il a fait savoir qu’il en ferait une ligne rouge.
Faut-il pour autant prendre le risque d’embraser le Moyen Orient quitte à faire le jeu des sionistes extrémistes ou des mollahs irrédentistes?Assurément pas !
Quel est l’objectif réel poursuivi par l’Occident ?
Pourquoi , s’il s’agit uniquement de punir un crime de guerre et si Assad est responsable du crime chimique, ne pas le faire juger par contumace par la Cour de Justice Internationale , tout en renforçant considérablement en armes antichars et anti aériennes la seule rébellion laïque afin de faire tomber au plus vite son régime?
Pourquoi ne pas prendre conscience qu’en réalité il n’ y aura pas de paix dans cette région tant qu’Israël n’aura pas été contraint de renoncer à son rêve du Grand Israël avec l’expulsion des populations arabes, et de négocier sincèrement un nouveau départ avec ses voisins ?
Pour cela il faudrait une pression ferme d'une Amérique dont les Présidents dépendent un peu trop de la diaspora juive et aussi la garantie des Russes, comme sera nécessaire leur appui pour interdire bientôt l’arme nucléaire à l’Iran . Autant de raisons de ne pas lesexclure du Proche Orient aujourd hui, et notamment de la Syrie.
C’est moins spectaculaire et sans doute plus malaisé, mais assurément plus responsable qu’un feu d’artifice de missiles de croisières aux conséquences imprévisibles sur cette poudrière.
Sortir de l’irrationnel, agir résolument mais avec sang-froid , voilà ce que les peuples attendent des dirigeants des principales puissance occidentales !
Dire cela c’est malheureusement constater l’amateurisme voire la complaisance du gouvernement français envers des intérêts qui ne sont pas ceux de la France.
Comment apprécier en effet les déclarations boute feu de Laurent Fabius qui, sans preuve publique, a demandé un recours à la force et s’est immédiatement précipité en Israël, non tant pour s’entretenir soudainement des pourparlers israélo palestiniens, que pour discuter de la Syrie avec un Netanyahou qui ne rêve que de guerre contre l’Iran ?On voudrait être sûr qu’aucune proximité personnelle n’influence excessivement le jugement de notre brillant ministre des affaires étrangères qui est avant tout un ministre de la France…Son voyage, dans les circonstances présentes était, à tout le moins, maladroit !
Comment juger un gouvernement qui ne cesse de tailler nos moyens militaires, dont les armées ne disposent que de la moitié des avions de la Syrie, dont la marine ne pourrait aligner qu’un porte avion et aucun missile de croisière, et qui prétend néanmoins jouer les premier rôles sur un théâtre d’opérations aussi lointain ?
Que penser de l’amateurisme de gouvernements qui après la laborieuse intervention en Lybie n’ont pu interdire le terrain aux islamistes faute de clairvoyance et de moyens, qui ne savent toujours pas trier le bon grain de l’ivraie en Syrie, choisissent les Frères Musulmans contre les laïcs en Egypte, et prennent le risque d’une disparition du Liban ?
Une fois encore le gouvernement de la France, dans la continuité du précédent, entretient dans le discours l’illusion d’une puissance universelle à laquelle il a en vérité renoncé dans ses actes par faiblesse, lâcheté, rouerie.
La France affaiblie économiquement, endettée, mal gérée, est en passe de perdre les moyens de peser en Europe et en Afrique, son pré carré ,parce que ses élites rêvent d’Europe fédérale et gaspillent les deniers publics !
Français , ne vous laissez pas abuser ! Ce gouvernement ne sait pas où il va , en cela comme en tout!
Roger Franchino