« L’Italie ingouvernable…les marchés sous le choc…la zone euro menacée…les comiques italiens..etc.. » . Que de grognements de toutes parts depuis que le vote italien est venu troubler la « drôle de guerre » régnant sur les marchés en attendant la prochaine débâcle !
Monti, leur candidat préféré , renvoyé à ses chères études, Bersani ,le Hollande local, en mal de pouvoir face au retour du « Cavaliere » porté par le rejet de l’austérité justement attribuée à « l’Europe allemande » selon ses termes et face au tsunami de Beppe Grillo qui, en prônant l’éthique en politique et la sortie de l’euro, a donné naissance en quelques mois au premier parti italien.
Bruxelles , Berlin, Paris, comme les marchés qui les gouvernent, s’agacent avec condescendance de ce peuple insoumis qui s’autorise un pied de nez à l’ordonnancement technocratique qu’ on tente de lui imposer !
L’Italie, malade, serait perdue s’égosillent les uns et les autres si elle devait tenir compte du choix de ses électeurs, comme la France l’était d’avoir osé voter « non » au référendum de 2005 !
Qu’en penser de ce côté-ci des Alpes?
Au plan économique, l’Italie « malade » a réalisé un PIB de près de 1600 milliards € en 2012 auxquels il faut rajouter l’économie « souterraine » qui représenterait 20% de ce chiffre…la richesse réelle produite serait donc de l’ordre de 1920 milliards € , assez proche des 2033 milliards € de la France dont l’économie « souterraine » est sans commune mesure....l ‘ Italie , si modeste en discours, n’est donc plus éloignée de nous en poids économique !
Plus marquant encore, l’industrie italienne est la deuxième d’Europe ( 16% di PIB) , derrière celle de l’Allemagne ( 23%) mais devant celle de la France ( 11%°), avec 200 000 entreprises exportatrices et un solide excédent du commerce extérieur (11 milliards €) contre 90 000 et un déficit abyssal dans l’Hexagone ( 70 milliards €).
C'est ainsi que de Turin à Venise, de chaque côté de l’autoroute, s’enchaine une suite ininterrompue de zones industrielles , quand de Paris à Chambéry ne se succèdent que champs et plateformes logistiques !
Certes, l’Italie est criblée de dettes représentant 126% de son PIB contre 90% « seulement » en France….mais le budget primaire ( hors dette) est désormais en excédent ( contrairement à la France) et l’Etat italien avec 3000 milliards € d’actifs est loin de l’insolvabilité !
Relevons enfin que jusqu’aux règles imposées par Maastricht et par le transfert de pouvoir à la BCE , la dette publique, très antérieure à la crise de 2007, a toujours été refinancée sans soucis par l’épargne locale (16% des revenus).
Alors comment ne pas comprendre le rejet de l'austérité sans fin imposée par Monti qui a entrainé la récession avec son cortège de malheurs et de chômage, le désespoir d'une jeunesse exclue, voire des drames avec la multiplication des suicides de patrons de petites sociétés acculées au dépôt de bilan?
De toute évidence cette Italie qui n’est pas la Grèce, n’est pas si éloignée de la France, et dispose même de ressorts industriels que nous pouvons lui envier !
Pour autant les Italiens, après 18 mois de gouvernement Monti illégitime puisque non élu et imposé par Merkozy, viennent de signifier que l’effort ne saurait être consenti sans perspectives, au nom d’un euro au service de l’Allemagne, et moins encore avec les vrais « comiques » qui les gouvernent depuis trop longtemps.
Tel est le sens du message, à l’endroit de leurs politiques et de l’Europe !
Quelle intelligence aussi de ce peuple, autrefois ferme soutien de l'Europe, dont la majorité a clairement compris et exprimé que ce sont l'euro et l'Europe allemande qui ont étouffé depuis 10 ans son économie avant de la précipiter dans la récession!
Quelle différence fâcheuse de perspicacité avec les Français que le discours des partis et des médias garde dans l'obscurantisme de l'euro " protecteur et irréversible", de la pensée unique pro européenne, libérale et fédéraliste!
Et puisque nous raillons les Italiens d'avoir un Berlusconi, soyons avisés de nous souvenir que nous avons un DSK pour le sexe, un Tapie pour les magouilles financières, un Chirac probablement pour les emplois fictifs, un Balladur dans le collimateur de la justice pour commissions occultes, tandis que les Espagnols ont peut être un Rajoy.....
« Chapeau ! » devraient en vérité s’écrier ces Français ,si prompt à distribuer des leçons, mais qui n’ont pas eu le courage en mai 2012 de bouter hors du pouvoir leurs propres « comiques » qui depuis si longtemps les distraient de ruineuses promesses de cabaret!
La leçon ne vient pas d’Allemagne cette fois, mais d’Italie où le compte à rebours est une nouvelle fois enclenché pour cette Europe autiste et dogmatique dont le destin est scellé…tôt ou tard le coup partira, d'Italie, d'Espagne, de Grèce, de Chypre ou même de France, nul ne sait ....mais il viendra, soyons en certains, car c'est dans la nature des choses.
Viva l’Italia !
Roger Franchino