Il ne se passe pas de semaine sans que les Etats européens ne sollicitent les marchés pour leur dette souveraine et curieusement, Europe libérale oblige, il s’en remettent à des agences de la dette qui proposent des obligations à des banques « partenaires » ( 23 en France) qui souscrivent en fonction des taux qu’attendent leurs clients finaux, généralement fonds de pension, fonds d’investissement ou assureurs étrangers.
Et les enchères sur les taux évoluent au gré des opinions intéressées des agences de notation et des appétits des dits investisseurs…
Afin de mettre un terme à la dictature de ces marchés, j’avais notamment proposé dans « Sauver l’Europe, ce n’est pas sauver l’Europe allemande » de renationaliser les dettes souveraines en faisant appel à l’épargne des ménages dans chaque pays européen où elle est abondante, ce qui est le cas de l’Allemagne, de l’Italie, et de la France
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Dans notre pays le seul stock d’épargne financière des ménages était de l’ordre de 3000 milliards € en 2010, et l’année prochaine le refinancement de la dette souveraine de la France sera compris entre 200 et 250 milliards €.
Pourquoi ne pas faire appel directement au patriotisme des ménages français, suggérais- je, afin de nous mettre à l’abri du racket des marchés financiers ?
L’idée, contrairement à quelques autres, ne fut reprise par personne…
Mais voici que la Belgique vient de la tester avec un succès très au delà de toute attente !
L’Etat belge a lancé voici deux semaines un emprunt , réservé à ses concitoyens, dont il attendait 200 millions €….il en a recueilli 5 milliards soit 25 fois plus au taux raisonnable de 4% !
L’Italie a conduit une opération similaire avec le même franc succès sur l’idée d’un entrepreneur italien !
Ce que la Belgique et l’Italie ont réussi, la France ne peut-elle le faire à grande échelle ?
Le pays y a eu recours avec succès à plusieurs reprises sous la IVème et sous la Vème République avec les emprunts Pinay à 3,5% indexés sur l’or, partiellement défiscalisés, et sur de longues périodes ( 54 ans notamment).
Nous pourrions proposer au pays un système similaire avec un objectif de 100 milliards € en 2012 ( 3% de l’épargne financière des Français !), un taux de seulement 2% net d’impôt mais avec un capital indexé sur un panier de grandes devises et d’or afin de protéger l’épargnant de l’inflation sans toutefois prendre le risque de faire éclater la charge du remboursement comme le fit l’emprunt Giscard. Sans doute faudrait-il prévoir aussi une exonération des droits de succession jusqu’ à un certain montant …
Cette voie allègerait le coût de la dette directement d’abord grâce à un taux faible justifié par une indexation du capital bien calibrée, indirectement ensuite en réduisant de 50% l’offre de dette souveraine française proposée aux marchés…
Si les principales puissances endettées en Europe reprenaient ce modèle, alors nul doute que l’avis des agences de notation ne soucierait plus grand monde, et que les marchés se retrouveraient quelque peu gros Jean comme devant…
Seulement voilà, il faudrait faire ce choix, c’est-à-dire une fois encore renoncer aux dogmes libéraux de la pensée unique qui règlent l’Europe et malheureusement la France !
Il faudrait vouloir mettre à la raison les marchés pour reprendre le contrôle de notre destin…
Le parti du renoncement, englué dans l’idéologie, ne saurait probablement s’y résoudre…
Aux gaullistes de le faire donc, puisque c’est d’eux que dépend encore le salut !
Roger Franchino