Nous y voici donc ! La crise financière maladroitement écartée en cédant sans contrepartie réelle au chantage des banques en 2008 est à nos portes, inévitable malheureusement et plus grave encore car affectant des Etats à genoux , divisés, soumis aux oukases des marchés financiers et aux oracles des agences de notation.
Le profit privé de quelques uns a pris le pas sur l’intérêt collectif, trois petites agences et le monde de la finance imposent peu à peu leur loi aux nations : c’est un nouveau fascisme qui n'avoue pas son nom encore.
Les pays développés sont criblés de dettes par incurie certes mais surtout pour avoir cédé aux marchés financiers qui, exigeant sans cesse plus de profits en faisant fabriquer dans les pays à bas coûts et consommer dans les pays à revenus élevés, ont imposé à des gouvernants complices la libéralisation à tous crins des échanges et la mondialisation.
Les échanges pipés par une concurrence inégale entre systèmes sociaux opposés, se sont rapidement déséquilibrés transférant la création de richesses vers les BRIC, amputant la croissance des pays développés, lesquels pour maintenir leur niveau de protection sociale ou leur standing de puissance se sont trouvés dans l’obligation d’emprunter toujours plus aux dits marchés.
Dans le même temps, les Etats livrés aux ayatollahs d’un libéralisme obscurantiste ont abandonné tout contrôle sur leurs banques et laissé proliférer fonds et instruments spéculatifs, et pas seulement dans les paradis fiscaux.
Quand est arrivée la crise de 2008 née des turpitudes des marchés, les Etats ont volé au secours des banques sans la contrepartie réelle qui eut dû être leur prise de contrôle et la régulation stricte des opérations spéculatives.Les profits bancaires et les bonus ont tout au contraire explosé dès 2010!
Les USA doivent à Reagan et l’Angleterre à Thatcher d'avoir été les initiateurs de cette dérive relayée par une Europe aux ordres.
Les Américains, dans l’illusion d’une Pax Americana éternelle née de la chute de l’Urss, ont dépensé sans compter pour financer de coûteuses expéditions vouées à l’échec en Irak et en Afghanistan, et ont laissé leur industrie délocaliser en Chine, armant la superpuissance de demain en même temps qu’ils en devenaient les débiteurs pour des montants colossaux ( 1900 milliards $ de dette américaine détenue par Pékin).
Ainsi les croisés du libéralisme le plus irrédentiste ont réalisé la prédiction de Mao selon qui « les capitalistes nous vendront la corde avec laquelle nous les pendront »… Mais allez faire comprendre cela aux prédicateurs du Tea Party !
L’Europe, de son côté, s’est soumise d’une part aux intérêts des Etats Unis et de la Grande Bretagne qui voulaient pour leurs multinationales et leur banques un marché ouvert prolongement économique du protectorat de l' Otan , et d’autre part à ceux de l’Allemagne qui imposa sa monnaie et sa politique malthusienne pour construire une unité utopique entre carpes et lapins comme le démontre une fois encore la crise de l’euro.
La Grèce et le Portugal vilipendés aujourd’ hui ont été autorisés sans sourciller hier à rejoindre l’euro au nom de la " grande Europe", chacun sachant que leurs statistiques étaient fausses, qu’ils étaient incapables de satisfaire aux critères de Maastricht et de supporter une monnaie forte.
La situation de l’Italie et de l’Espagne n’était pas significativement différente, mais les « cabris » atlantistes de l’Europe « über alles » sautaient si bruyamment sur leurs chaises de Paris à Bucarest , et d’Oslo à Nicosie qu’il était impossible de faire entendre les bergers qui criaient au loup !
La situation de la France n’était guère plus enviable comme le démontre à postériori un déficit attendu en 2011 des échanges extérieurs de 80 milliards € contre l’équilibre il y a 10 ans à l’entrée en vigueur de l’euro, et un excédent de 23 milliards € Euros en 1997 !
Mais les faits sont têtus n’en déplaise aux « économistes » de la pensée unique ( les Minc, Attali etc…) et à leurs journalistes marionnettes qui peuplent des médias à la botte. Ils le rappellent avec une crise de la dette souveraine qui n’est autre, en vérité, que celle d’une monnaie unique qui n’est qu’un "euromark" par la faute de Mitterand qui l’ a non seulement accepté, mais voulu.
Les BRIC , enfin, ont largement profité de cet appauvrissement relatif des pays développés, et la Chine , qui n’a rien d’un marché ouvert ni d’un pays communiste, qui exploite un prolétariat sans protection sociale minimale, triche avec une réglementation hyper nationaliste, une contre façon érigée en sport national, une monnaie sous- évaluée , s’est transformée en usine polluante du monde accumulant les excédents en attendant de devenir la première puissance économique , financière, militaire et donc politique du monde.
Alors que faire quand les vagues du tsunami s’apprêtent à nous submerger , quand il semble déjà bien tard ?
Le parti du renoncement, c’est-à-dire celui qui est aux ordres des marchés financiers, nous dit qu’il n’ y a pas d’autre issue que la fuite vers une gouvernance supranationale en Europe pour sauver l’euro réputé notre meilleur bouclier.
C’est très exactement ce que souhaitent les « investisseurs » qui voient dans le fédéralisme la possibilité d’affaiblir un peu plus les Etats c'est à dire les peuples , de réduire la sphère publique qui dans l’ensemble redistribue et protège les citoyens, et de soumettre les récalcitrants à des institutions non élues ou à des pays acquis à leur cause.
Ce fédéralisme qui serait imposé contre la volonté des populations comme le fut le traité de Lisbonne, c’est le déguisement sous lequel se cache en réalité la tentation fasciste du monde de la finance et des gouvernants qui le servent.
Ce parti du renoncement va en France de l’UMP ( à l’exception de rares individualités) aux Verts en passant par les centres et les socialistes qui viennent sans vergogne, en appelant au fédéralisme par la voix de Hollande et Aubry, de se ranger une fois de plus dans le camp opposé à celui qu’ils prétendent défendre.
Ce parti se trompe !
Le fédéralisme ne changera rien au fait que l’euromark ne peut pas être la monnaie de l’Europe car des structures économiques si différentes s’y opposent !
L’Europe se meurt d’une croissance insuffisante qui nourrit la dette, non l’inverse !
Quand les taux d’intérêt sont durablement supérieurs à la croissance du PIB, le poids de la dette croît sauf à réduire drastiquement les déficits , ce qui dans le cas présent ne ferait que nous engager dans la récession comme on le voit en Grèce et ne ferait que rendre encore plus problématique le remboursement des intérêts, sans parler du principal !
C’est stupide, inefficace, criminel pour les populations mais pas pour les marchés qui pensent "global" et s’en moquent, le regard rivé sur leurs profits à court terme et leur volonté de puissance.
Le monde de la finance qui ne produit pas de richesses dispose, parce que des idéologues et des politiciens aux ordres y ont consenti, d’une force de frappe inégalée en pouvant mettre en jeu à chaque instant des masses d’argent équivalentes à plusieurs fois le PIB mondial.
C'est pourquoi rien n’est possible pour le redressement, pour la croissance de nos pays, et pour la démocratie, si les Etats ne livrent pas enfin bataille à ce monde là, puisqu'ils représentent, en dépit de leurs imperfections, les Nations c’est à dire le meilleur rempart des sociétés contre la loi de la jungle et l’asservissement.
A quel niveau agir ?
Evidemment, il faudrait un consensus des Etats au niveau mondial, mais c’est une utopie et le temps presse.
Un consensus en Europe serait plus accessible peut être dès lors que France et Allemagne s’entendraient et que l’Angleterre, qui défend la City, ne s’y opposerait pas.
Dès lors, que tenter sinon au niveau de la France ?
1) En premier lieu , convaincre l’Allemagne que l’euromark doit mourir pour donner une dernière chance à l’euro.
L’euro doit dévaluer de 30% par rapport au dollar et au Yuan pour espérer une croissance minimale annuelle de 3% qui doit devenir l’objectif prioritaire de la BCE.
A défaut, il faut présenter à l’Allemagne un plan B crédible de sortie de l’euro avec les mesures d’accompagnement qui s ‘imposent afin qu’elle ne doute pas de notre résolution.
En second, pour réduire la dette souveraine et accompagner la croissance, imposer à la BCE d’ acheter des obligations d’Etat c’est-à-dire faire marcher la « planche à billet » quitte à accepter 4% à 5% d’inflation pendant le temps nécessaire pour retrouver l’équilibre des budgets.
3) En troisième, pour rétablir la compétitivité du travail en Europe, mettre en place dans l'UE une TVA sociale permettant de réduire les charges sur les salaires européens et d’en faire porter le poids sur tous les produits importés ou non.
Cela ne conviendra ni à la Chine ni à l’Inde , mais peuvent elles se passer d’un marché de 550 millions d’habitants solvables ?
Rétablir cette compétitivité ne saurait aller toutefois sans un re-engineering des tâches des Etats, ce qui veut dire moins de lois et de directives inutiles, moins de niveaux hiérarchiques ( exemple : suppression du département en France) donc moins de personnel.
4) Enfin rétablir la suprématie sur les marchés des Etats Nations dont dépend le salut en dernier lieu :
- Prise de contrôle par les Etats, et assurément en France, des banques et assurances dites « systémiques » à l’occasion d’une chute de leur valorisation comme c’est le cas actuellement, scission des activités de détail , d’investissement, et d’assurance, contrôle des rémunérations..
- Suppression de la référence aux notations des agences privées actuelles pour les dettes souveraines dans l’appréciation des créances de banques européennes et remplacement par un audit annuel à partir , par exemple, des rapports des Cours des Comptes de chaque pays de l’UE .
- Augmentation des dépôts de garantie sur les activités spéculatives, renforcement de la taxation des opérations sur produits dérivés.
L’Angleterre résistera certes mais l'incendie la touche tandis que la baisse de l’euro et la consolidation des banques françaises voire allemandes et italiennes la mettraient sous pression pour renforcer le contrôle de la City.
Les "marchés" n 'apprécieront pas le retour des Etats? Et alors? Après une mauvaise humeur passagère, il leur faudra bien placer leurs liquidités. Ni l 'Asie ni les USA n 'y suffisent, et une Europe régulée mais retrouvant la croissance présentera un charme nouveau!
Ces mesures pourraient constituer un premier signal de la volonté des Etats européens de faire face sans céder aux marchés et de livrer le combat que les citoyens attendent..
Le feront-ils ?
On peut en douter, mais alors rien ne préservera demain ou dans quelques mois nos pays d’une crise profonde et les élites qui les dirigent de réactions que nul ne peut prévoir !
Face aux artisans du déclin il reste l'espoir, et c’est aux nationaux de l'incarner une fois de plus !
Katsumoto