Avec la contre- offensive des forces de Kadhafi , c’est la menace d’enlisement qui se précise.
Les raisons, multiples, en sont connues à défaut d’être toujours reconnues.
En premier, les atermoiements des Français et des Britanniques qui ont choisi de consulter préalablement l’UE, puis l’Onu, sacrifiant l’effet de surprise de frappes chirurgicales et massives ont laissé au dictateur le temps d’organiser sa défense, de mettre à l’abri l’essentiel, et de porter des coups terribles aux rebelles en les reconduisant une première fois à Benghazi sous la pression de ses blindés.
En second, le mauvais choix précédent est aggravé par la faiblesse des insurgés qui ne sont ni équipés ni organisés, ni aidés au sol pour affronter une armée gouvernementale dont le potentiel n’a pas été suffisamment affaibli.
En troisième, la coalition est divisée entre ceux qui interprètent restrictivement la résolution de l’Onu, limitée à l’interdiction de vols aux appareils lybiens, et ceux qui sont prêts à lancer leurs avions dans l’appui au sol des insurgés. Comment expliquer sinon que les forces de Kadhafi aient pu repousser de 100kms de Syrte à Ras Lanouf puis Brega les rebelles sans que les avions alliés ne calcinent leurs blindés ? Côté français on peut s’étonner qu’au lieu d’intervenir directement pour stopper la contre-attaque des pro-Kadhafi , une patrouille soit aller détruire une batterie anti aérienne dans le Sud !
Au train où vont les choses, il est clair que, sauf à ce que la coalition détruise les forces blindées de Kadhafi, nous nous dirigeons tout droit vers l’enlisement, avec le risque d’ une partition de fait du pays qui ne peut aboutir, à terme, qu’ à une victoire diplomatique de Kadhafi, la coalition ne pouvant protéger indéfiniment les rebelles.
La conséquence serait pour les Occidentaux, et particulièrement pour la France qui fut en pointe, une perte supplémentaire de crédibilité.
Quelle issue possible alors et quelles leçons ?
Pour sortir de cette situation, sauf à compter sur une révolution de palais dans le clan Kadhafi, soit la coalition envoie ses avions appuyer les rebelles en détruisant les chars et l’artillerie de Kadhafi tout en organisant leurs forces en les équipant d'armes antichars et moyens de communication, soit elle obtient l’intervention au sol de la république « sœur » d’Egypte, soit enfin elle prépare son retrait avec tous les inconvénients associés.
Au plan des leçons à tirer, il en apparait de très sérieuses pour la France.
Car qui ne voit que le pays a eu le plus grand mal à aligner une quarantaine d’avions ( dont des Super Etendards obsolètes ) ? Que plus de la moitié des sorties aériennes a été le fait d’avions américains ?Que la guerre électronique pour le brouillage des radars est encore le fait des USA, tout comme l’usage de missiles de croisières ? Que nous sommes contraints d’utiliser des avions de reconnaissance quand un satellite militaire devrait nous informer en détails des mouvements de troupes de Kadhafi ?
Manifestement nous n’avons plus les moyens de nos ambitions, raison suffisante pour cesser de gesticuler dans toutes les affaires du monde et pour remettre à plat priorités et stratégies.
Le réalisme devrait nous conduire à nous concentrer sur l’Europe, l’ Afrique, la Méditerranée et à nous retirer de tous les autres engagements extérieurs dont l’Afghanistan.
De cela, il devrait aussi découler un débat sur les moyens à donner à notre défense, qui apparaissent en Lybie clairement insuffisants pour maintenir un minimum d’autonomie.
Ce débat nous amène évidemment à nous interroger sur nos budgets et sur la puissance économique de la France sans laquelle rien n’est possible, en matière de Défense comme en toute autre chose.
Comment concilier le pacte de compétitivité imposé par l’Allemagne , la Commission et la BCE , qui contraint nos budgets, l'anémie de notre économie garrotée depuis trop longtemps par un euro surévalué, avec le développement des moyens de notre indépendance ?
On voit bien que tout se tient, et que des choix politiques incohérents se heurtent tôt ou tard à leurs contradictions.
Kadhafi n’est pas, ne vous en déplaise messieurs les politiques, le premier responsable de notre probable enlisement en Lybie !
Prenez conscience des raisons qui nous y conduisent et tirez en les conséquences !
Katsumoto